Ce confinement a commencé en temps de carême, je me suis dit : « Tiens, c’est un désert, une traversée que tu vis avec Jésus »… Mais le désert est un lieu ouvert, à perte d’horizon, sans fermeture, un espace presque illimité…et de préparation à Pâques.
Alors que j’étais en train de vivre des mesures strictes d’espace, de sorties, de portes fermées, de distanciation sociale etc… Dès le début, ma décision a été d’accueillir et d’intégrer ce temps inédit.
Dans ma prière plus longue et plus dégagée du rythme quotidien d’avant le confinement, l’Esprit du Seigneur est venu me rejoindre dans ma quête de sens… Que nous arrive-t-il qu’est-ce que cela veut dire ??
Il m’a dit très clairement : « Suzanne, toi qui fais de l’itinérance franciscaine (*) chaque année, tu vois cette année je t’offre une autre forme d’itinérance. Celle de la faire d’une façon toute nouvelle que tu ne connaissais pas jusque-là. »
(Je ressentais un état intérieur différent : espace élargi, temps allongé).
Celle de la communion : « Va par MOI, et avec MOI, en solitude, silence et relation, à tous ceux que je te fais revisiter en mémoire. Tu le feras par les moyens qui te sont donnés en ce confinement (tél, mails, SMS) et surtout par ta prière. Sois ma Providence en leur faisant un signe de confiance, de patience, de fraternité et d’espérance. » Cette parole de Marie de la Passion, notre fondatrice a pris alors une résonance très vive et très actuelle … «Communion, ce mot me remplit »
C’est ce que je pratique modestement et tout simplement au fil des jours confinés, itinérants.
« Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps » Mt 28
Témoignage de Suzanne Delaruelle, FFM
(*) Itinérance Franciscaine, qu’est-ce à dire ?
Le jour de la St Mathias dans la petite église de la Portioncule à Assise, François qui a choisi ce lieu comme résidence, entend et écoute cette Parole de l’évangile Lc 10,1.11 ; l’envoi des disciples en mission, transporté aussitôt de joie dans l’Esprit-Saint il s’exclame » : Voilà ce que je veux, voilà ce que je cherche, ce que du plus profond de mon cœur, je brûle d’accomplir. » (1Cel22)
C’est de cette inspiration et de sa mise en œuvre par François en son temps que depuis 20 ans, je pratique, en fraternité avec 2 ou 3 sœurs ou laïcs, cette forme d’évangélisation pour aujourd’hui.
Nous ouvrons nos cœurs à Dieu dont la Providence ne nous manque jamais.
Nous partons souvent d’un lieu franciscain, communauté ou fraternité de laics OFS, dans une région déchristianisée, pauvre ecclésialement. Nous sommes aussi en lien avec l’Eglise du diocèse et locale, car nous sommes envoyées.
Tout au long de l’itinérance, c’est la rencontre avec ceux que le Seigneur met sur notre chemin qui rythme nos journées.
Nous avons besoin de manger, boire, dormir, prier et d’entrer en relation. Car nous n’emportons ni argent, ni provisions, ni carte, ni adresse, ni tél. portable, seulement la bible en poche » Libres comme pèlerins et étrangers » nous dit l’Evangile.
Nous formons une fraternité dont le Roc est la prière, et la rencontre avec l’inconnu. Dès que vous entrez dans une maison dites « paix à cette maison » ce fut la recommandation de François à ses frères, c’est notre pratique soit à haute voix ou à voix basse.
L’itinérance selon St François est tout d’abord, une manière de se situer, en pauvre, en mineur, en accueilli. Au cours de la rencontre nous devenons les accueillants en écoutant avec intérêt, respect et souvent compassion, un bout d’histoire de celui qui nous ouvre sa maison, sa table …. »
Enlève tes sandales car ce lieu que tu foules est Saint. » (Ex 3, 5)
Ce Dieu–Provident nous étonne toujours par ce qu’il nous fait vivre d’INOUÏ, c’est-à-dire la nouveauté de l’Evangile au quotidien, comme une VISITATION.
Au fur et à mesure des années d’itinérance, je suis émerveillée de l’action du Dieu –Trinité qui a choisi de passer par nos vies humaines ordinaires s’ouvrant à son passage (comme au chêne de Mambré) et de nous conduire à Sa Fraternité Universelle, qui n’est rien d’autre que son Royaume.
« Le Royaume de Dieu est là, tout près de nous »