Présentation de la Croix de Saint Damien par Myriam

Nous avons la chance de pouvoir publier et partager avec vous la présentation de la belle Croix de Saint Damien que Myriam a réalisée pour la nouvelle Icône visible dans l’Eglise Notre-Dame des Grâces du Chant d’Oiseau.

 

Cette icône est la réplique exacte de la Croix vénérée dans la Basilique Sainte Claire à Assise. Elle a été écrite par le maître iconographe italien, Monsieur Paolo Orlando, au couvent des Frères de Bruxelles du 25 /01   au 13 /02  2019 et bénite par Mgr Kockerols lors de l’Eucharistie du 14/02.

 

Œuvre d’un artiste ombrien inconnu, le crucifix qui « parla » à François et que Claire contempla sa vie durant, date du début du XIIe siècle. Sans doute a-t-il été réalisé pour la petite église de Saint-Damien. Peint sur une planche de noyer, il mesure 2,10 m de haut sur 1,30 m de large.

L’influence syro-byzantine de cette croix est évidente. Elle est peut-être due à des moines syriens fuyant, vers le VIIIe siècle, les Iconoclastes qui prohibaient la représentation et la vénération des images du Christ et des saints et  qui se seraient réfugiés en Ombrie.

 Le peintre ne signe pas son œuvre. Elle est en elle-même une prière sacrée éveillant celle du fidèle par sa fonction liturgique.

L’icône de Saint-Damien donne à voir l’invisible dans le visible. Au-delà de l’image, des couleurs, des mouvements, sa beauté nous invite à pénétrer dans le mystère d’Amour du Dieu Trinitaire. Accueillons-la comme une porte du ciel ouvrant sur la Vie offerte par le Crucifié- Ressuscité.

Nous t’adorons, Très Saint Seigneur Jésus-Christ,

et nous Te bénissons d’avoir racheter le monde

par ta Sainte Croix

 (St François)

 

Prenons un moment pour accueillir ce grand Mystère contemplé par l’artiste, le temps de « poser notre regard, notre cœur » disait Claire sur celui qui a donné sa vie pour chacun(e) de nous.

 

Aime totalement Celui qui s’est donné tout entier par amour pour toi.

4ème lettre de Claire à Agnès de Prague

 

Oh ! comme il est saint et comme il est cher, bien plaisant, humble, pacifique,

doux et aimable et par-dessus tout désirable d’avoir un tel frère et fils,

qui posa son âme pour ses brebis et pria le Père pour nous en disant : 

« Père saint, garde en ton Nom ceux que tu m’as donnés ».

François, Lettre aux fidèles

 

Sans cesse, François portait Jésus au cœur, Jésus à la bouche,

Jésus dans les oreilles, Jésus dans les yeux, Jésus dans les mains (…).

Avec un amour étonnant, il portait  et conservait toujours en son cœur

Le Christ  Jésus et le Christ crucifié…

Thomas de Celano, 1ère Vie de François 115

 

Le Christ en gloire

Jésus, au centre de la croix,  tel l’Arbre de Vie du Jardin (Gen. 2,9), est le Crucifié-Ressuscité qui donne sa vie dans la souveraine liberté de l’amour. Son corps, jeune et beau, est indemne des sévices de la passion. Il est le Vivant dont l’être tout entier, en geste d’offrande, irradie l’icône de lumière  qui chasse les obscurités du mal et de la mort. Ses bras et ses mains  sont  largement ouverts dans une attitude de don et d’abandon confiant au Père et d’accueil large, inconditionnel, de notre fragile humanité. 

Voici le visage humain du « Dieu Très-Haut et glorieux  » !

Le Crucifié porte, non pas la couronne d’épines, mais une couronne de gloire. Elle rayonne l’excès d’amour du Père pour le monde sans rien nier de la souffrance que nous lui avons infligée (cfr. le tracé de la croix dans l’auréole). Remarquons les petits carrés qui y sont inclus, symbole des évangélistes à qui nous devons les récits de la Pâques du Seigneur.

Sur l’écriteau, une double inscription en latin, motif de sa condamnation : Jésus  le Nazaréen,  Roi des juifs.

De ses plaies jaillit son sang, source vivifiante répandue sur toutes créatures, célestes et terrestres. 

Ses yeux, démesurément grands, traduisent une immense bonté, une profonde vulnérabilité, en même temps qu’ils expriment une interrogation douloureuse.

Son regard, à la fois grave et serein, porte tout le drame de la multitude errante, blessée. Mais aussi toute l’espérance de Dieu. Curieusement, notre regard ne peut croiser le sien. Il n’arrête pas à Lui. Il entraîne le nôtre plus loin, au-delà de nous… vers son Père ?… vers l’humanité  en détresse?

Sur son front, un cercle semble tracé. Certains y voient une évocation de l’Esprit Saint qui l’habite en plénitude.

A chaque extrémité des bras de la croix, conversant, pourrait-on dire, sur le mystère inouï de la Passion de  Dieu pour l’homme,  des anges, messagers de La Parole, eux aussi baptisés dans le sang de Jésus, le désignent comme le Messie attendu.

Deux autres personnages semblent se joindre à eux. Seraient-ce les femmes venues au  tombeau le matin de Pâques, premières témoins de la résurrection?

 

Tout un peuple entoure Jésus  ceint de l’éphod. Ce pagne de lin égyptien était à l’origine le seul vêtement du grand-prêtre lorsqu’une fois par an, au Yom Kippur, il se présentait dans la nudité de l’humain pécheur, intercédant pour lui auprès  de Dieu. Désormais c’est le Christ notre frère, notre seul médiateur auprès du Père.

De gauche à droite, nous identifions :

Marie, la mère de Jésus ; Jean, le disciple bien-aimé ; Marie-Madeleine ; Marie, mère de Jacques et le centurion.

Marie se tient à l’extrême droite de son enfant qui, en Orient, désigne la place d’honneur. Sa tunique violette rappelle l’intérieur de l’arche d’Alliance recouvert de bandes d’étoffe pourpre. Demeure de Dieu, elle est le prototype de l’âme croyante.

Elle tourne son regard vers Jean, le « fils » reçu au pied de la croix 

(Jn 19,26-27) et porte sa main gauche sous le menton, indiquant à la fois l’étonnement et la douleur.

Jean, tout près de Jésus comme à la dernière Cène, lové dans sa hanche, occupe la place de la tendresse, sous la blessure du côté d’où la Vie s’écoule pour lui. Il porte le manteau rose, couleur de la sagesse, des chercheurs de Dieu. D’un geste de la main, il semble attendre de Marie une explication, une réponse, car ce qui se déroule sous ses yeux est mystère de foi. 

A la gauche de Jésus, Marie-Madeleine esquisse le même geste de compassion que Marie. Sa robe rouge dit tout l’éclat de son amour pour Jésus.

Marie, la mère de Jacques,  affirme sa foi par sa main droite levée.

Les deux doigts levés du centurion romain confessent que le Crucifié est bien homme et Dieu . Il tient dans sa main une pièce de bois (rappel de la synagogue bâtie à Capharnaüm ?). S’il n’a pas d’auréole, sa taille équivalente à celle des 4 disciples dit la dignité de chaque homme dans le regard de Dieu.

Au second plan, le petit visage serait-il celui de son fils ?

Derrière lui, d’autres têtes : l’esquisse d’une foule qui  regarde à distance, où nous sommes présents?

Aux pieds des cinq grands témoins, deux petits personnages :

Longin, le soldat romain qui transperça le côté de Jésus d’un coup de lance et un garde du temple qui Lui tend l’éponge imbibée de vinaigre.

 

A hauteur des genoux de Jésus, un coq, annonciateur du Soleil de la Résurrection, chante le pardon offert à Pierre, le renégat : «  Simon, Simon, quand tu seras revenu, affermis tes frères » (Luc, 21,32).

 

La descente aux Enfers (partie inférieure de l’icône).

Celle-ci est écrite par Mr Orlando car le sujet qui se trouvait initialement à la base de la croix a disparu.

 Nous y contemplons la réalité du Samedi Saint : Jésus, déjà revêtu des signes de victoire tels qu’ils apparaissent dans son Ascension, descend jusque dans les profondeurs de la mort dont Il brise les portes pour nous en arracher vivants et réconciliés. Toute l’humanité est  représentée par des figures bibliques : Adam et Eve, David, le roi-messie ancêtre de Jésus, Abel, le premier assassiné par son  frère Caïn et Moïse qui libéra le peuple de l’esclavage d’Egypte.

Le Christ en ascension (partie supérieure de l’icône).

Revêtu d’un vêtement de lumière, Il tient en main une croix d’or, emblème de la Vie victorieuse sur la croix du Golgotha. L’écharpe rouge est l’enseigne de son pouvoir exercé dans l’amour.

Sa tête et sa main sortent du cercle (symbole de perfection), Le Christ est Dieu au-delà de toute perfection humaine. Son large sourire annonce l’épreuve traversée. Il entre dans la plénitude du Père, sa main droite tendue vers Lui qui le bénit.

Le Père, sans visage, est cette main qui envoie le Fils et l’accueille, solidaire de sa passion d’amour pour nous. Les trois doigts assemblés indiquent le mystère de la Trinité. Les deux doigts étendus désignent la double nature du Fils, homme et Dieu.

Autour du Fils, rayonnante de bonheur, une communauté d’anges vêtus comme Lui de rouge et d’or l’accueille et participe à la joie du triomphe de la Vie sur la mort.

 

L’encadrement de la croix

Tout le long de la croix, dite de St François, court une guirlande de feuilles d’acanthe, symbole du Paradis. « Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis » (Luc, 23,43). Par sa mort d’amour, le Christ nous ouvre la porte du bonheur désiré par le Père pour chacun de ses enfants.

L’or dit l’éclat de la beauté  du Dieu saint. La couleur rouge sur le fond de la croix est le signe de la Source de Vie et d’Amour qu’est le Père. Ce qui semble de couleur noire est en réalité un bleu très foncé (au moyen-âge, les peintres n’utilisaient jamais le noir), présence du Souffle jailli des profondeurs de Dieu. Les fines volutes blanches écrites dans le contour rouge et bleu  signifient l’humanité du Fils de Dieu. C’est bien l’Amour infini de la Trinité qui est à l’œuvre pour le salut du monde à travers l’humanité du Fils. Désormais, le Fils de l’homme souffrant et transfiguré, et avec Lui notre humanité, se trouve enfoui au cœur de la Trinité.

L’icône récapitule le Mystère des Trois Jours Saints : Passion, « Descente aux  enfers », Résurrection.

Sa verticalité nous entraîne du calvaire dans la gloire du Père en passant  par la descente du Christ au séjour des morts qui attendent leur libération.

Horizontalement, sous les bras de la croix, le regard rencontre  les témoins, premiers bénéficiaires de la Passion et de la Résurrection et, au-delà, chacun(e) de nous.

 

Myriam, Clarisse